Descriptif
Informations
Une vieille cave sombre dans les sous-sols de Prague. C’est là que Hanta presse inlassablement le vieux papier, les déchets du monde de la surface pour en faire des ballots depuis un gros paquet d’années. C’est là aussi qu’il cueille au passage les livres mis au rebut, dont il savoure le moindre mot avant d’en faire un joyau lumineux serti au cœur des paquets de papier vulgaire, pourri, sortant de sa presse. C’est là qu’il s’emplit de la lecture des grands philosophes, et de bière aussi. Pour se souvenir, pour espérer, pour vivre.
Rédigé à une époque très significative pour la région, le roman de l’auteur tchèque Bohumil Hrabal n’en est pas moins, à mon sens, une fable universelle. Ce vieil homme ne parvient plus à coïncider avec le monde, et celui-ci avance déjà sans lui. Une trop bruyante solitude raconte différentes formes d’appartenance et d’inclusion, que ce soit par le travail du personnage (et sa manière de le réaliser), mais aussi par la pression extérieure que la société opère sur lui. Dans ces emboîtements, c’est toujours la vivacité qui est prise au piège par l’inertie et la contrainte des normes, de la productivité, mais aussi de la matière.
Je me suis plongée dans cette matière, en voulant savourer cette « euphorie de la palabre » (Bohumil Hrabal) par les moyens qui sont les miens, et en voulant partager cette expérience. J’ai choisi une scène à échelle humaine, offrant une grande proximité avec le spectateur et envisagé une scénographie reposant notamment sur des outils de jeu manipulables. Des extraits de ce monologue intérieur accompagnent le déballage d’images mentales du personnage, aux prises avec leur indéfectible matérialité. Cet espace est clos, circulaire comme une cour d’assises ou une arène : c’est le « petit théâtre intérieur » de Hanta, où, malgré toute la pression extérieure, la matière peut devenir le support de l’imaginaire, de l’illusion, du jeu.