Benjamin Azoum

Résumé

La virilité est considérée comme la qualité maximale dont l'homme est censé être porteur. Elle s'orchestre par des valeurs optimales physiques et psychologiques. La virilité est héritée d'une tradition immémoriale comme la part la plus noble ou du moins la plus accomplie du masculin. C'est une volonté de perfection et de contrôle de soi qui doit agir aussi bien par le physique que par le moral, par des qualités propres comme celles de la vigueur, du dynamisme, de la puissance, du courage, de la retenue, jointes à la puissance sexuelle. C'est un mode de reconnaissance chez l'homme. Vir n'est pas seulement le mâle mais aussi la vertu, l'assurance, la maturité, la certitude et c'est surtout un rapport de domination envers autrui. Le but de ce mémoire est pour moi de comprendre un peu mieux ce qui a construit l'allure masculine mais surtout l'allure de l'homme viril. Pour ma création artistique, je m'inspire beaucoup de la consistance des vêtements dits masculins. Les équipements et uniformes militaires, les vêtements de travail, les costumes font partie de mes références pour leurs détails, leur fonctionnalité mais surtout pour leur symbolique et leur allure. En travaillant sur ce vestiaire, je souhaite m'interroger sur son histoire, réussir à le comprendre tout en respectant les cultures et les évolutions de notre monde. Car le vêtement masculin est aussi construit sur des appuis du corps qui marquent ses atouts, souvent utilisés pour démontrer sa puissance, sa force et sa mobilité. Historiquement construit dans une opposition au féminin, même s'il se transforme au cours du temps et adopte d'autres formes presque sensibles, il souhaite essentiellement se placer au-dessus d'autres formes dites féminines. L'homme doit afficher des symboles de supériorité et de domination. La virilité est un concept qui hiérarchise la place de l'homme au-dessus de celle de la femme. Mais c'est aussi une forme de supériorité de l'homme sur l'homme lui-même. L'homme trouve en l'autre des faiblesses, des sensibilités ou simplement des codes masculins qui ne sont pas les siens pour discriminer l'autre et le rendre inférieur. Cette volonté de dénigrer l'autre passe par la réduction des valeurs étrangères. Les colonisateurs envahissent des peuples dans une prétention à croire que seuls leurs idéaux font d'eux de vrais hommes et ceux des autres ne sont qu'inférieurs. Les mâles alpha au travers de leur supposée force physique et mentale, méprisent tout indice de différence ou de sensibilité et cherchent à se s'élever et se distinguer. Le fait de ne pas partager les mêmes attributs du paraître devient alors une justification de plus pour s'ériger en tant que supérieur. Ce jeu de l'allure masculine met en place les codes exacerbés qui composent la silhouette dominante. Les hommes se plaisent à justifier les racines de leur virilité au travers de références masculines, figures emblématiques des temps passés, où leur robustesse, leur force et leur résistance leur ont permis de vaincre tous les obstacles se dressant sur leur chemin. Durant l'Antiquité, la nécessité de fortifier et d'éduquer est au cœur de sa construction et passe par la virilité du corps masculin dont elle est emblème. L'andreia est l'expression « être un homme » dans le sens le plus accompli du terme. Il l'incarne par sa puissance musculaire, son courage, son audace dans l'adversité et son opiniâtreté face au mauvais sort. Les Grecs comme les Romains prônent l'éducation physique. Le corps de l'homme doit se construire par des épreuves qui renforcent tous ces caractères de mâle. Les garçons sont enrôlés et pour survivre aux rites, ils doivent combattre. Ils glorifient leurs références mythologiques pour promouvoir leurs racines et donc leur sang. À contre-courant, leur virilité, pourtant très rude, est mise à l'épreuve face aux Barbares à l'apparence effrayante. Ils sont sans pitié et envahissent leurs terres. Mais ces derniers sont néanmoins porteurs de valeurs viriles. Car la virilité est historique comme anthropologique. Ces critères perdurent mais peuvent varier en fond.