Elisa Florimond

Résumé

Le monde est aujourd'hui saturé d'artefacts et d'images. A celles que les années d'après-guerre ont imposé dans les sociétés par les médias et la publicité, autrement dit, la consommation de masse, se sont rajoutées les images du chaos d'Internet et celles des téléphones portables inondants les réseaux sociaux. Ce ne sont plus des banques d'images mais un flot, une marée qui se déverse chaque jour. N'importe qui devient créateur et transmetteur d'images et tout le monde enregistre et diffuse sa mémoire sur écran. La vie est devenue picturale et la mémoire s'apparente aux espaces de stockage d'appareils technologiques. De ce fait, l'art aujourd'hui se transmet en étant presque plus vu que vécu . Dans cette prolifération d'images et d'objets de consommation, s'est développée une pratique artistique visant à distinguer ce qu'il est à conserver et cherchant à structurer des morceaux de ce chaos. Des penseurs, des artistes, des historiens et des écrivains ont tenté d'échantillonner notre monde par le travail de la collection et de cela émane une nouvelle forme de savoir. Dans cette panique de prolifération matérielle et iconographique, le premier point à établir serait de différencier la collection de l'accumulation. Ces notions sont voisines à la différence près qu'accumuler est une action qui se porte sur un ensemble d'éléments choisis par frénésie. à l'inverse, les objets constitutifs d'une collection sont présents pour des raisons définies. A cela s'ajoute l'idée de conservation dans la collection, dans différents buts qui seront développés dans ce mémoire. Pour tenter de cerner les caractéristiques et visées de cette pratique de collection, d'association et de retransmission d'objets, le premier temps d'étude se consacrera à définir cette idée en y greffant des notions telles que la préciosité accordée aux objets, l'ordonnancement du chaos du monde, l'affranchissement du rapport au temps, l'histoire et les buts de la collection et le profil du collectionneur.

À ces notions seront raccordés des portraits et des études de pratiques d'artistes collectionneurs afin d'élargir le thème de collection au monde de l'art. Dans un second temps, le mémoire se concentrera sur des créations par la collection d'images ainsi que sur le procédé atlas parfois attribué. L'étude des dispositifs plastiques que ces artistes collectionneurs d'images mettent en oeuvre permet d'identifier un des aspects spécifiques de ce travail d'association d'image : celui de faire naître de nouvelles interprétations et de révéler ainsi leur potentiel latent. Il sera donc question ici de comprendre leurs processus de création depuis le choix des images jusqu'à la transmission de leurs oeuvres. Des fragments de textes et des atlas comparés analyseront ces collections d'images devenues oeuvres au travers de pratiques telles que l'archivage, la reproduction ou l'appropriation. Enfin, l'étude de l'atlas comme perturbation de l'ordre du savoir au travers de la recherche d'Aby Warburg et de celles contemporaines d'artistes collectionneurs conclura ce mémoire.

La collection d'objets et d'images, ainsi que la forme atlas, seront étudiées comme des expériences visant à extraire des microcosmes du flot mouvant de l'univers. Elles seront considérées comme des préludes à la constitution d'un horizon d'un nouveau savoir et à la définition de la valeur attachée à cette forme d'art. Patrick Tacussel, dans son étude sur la figure du collectionneur explique que l'art de collectionner est une forme de ressouvenir pratique . La collection est une forme de mémoire.