L’Après. Récits de chantier, un entretien avec Théo Etrillard, diplômé 2024 en Design Objet

Théo ETRILLARD © Béryl Libault
Théo ETRILLARD © Béryl Libault

D’une ligne de mobilier à des fouilles archéologiques sur le chantier de l’École, Théo Etrillard explore la voix des ruines.

    Récits de Chantier

    Je m’appelle Théo Etrillard, j’ai 24 ans et je suis né à Mont-de-Marsan, dans les Landes de la France. J’ai rejoint l’Ecole des Arts Décoratifs en 2e année de licence Design Objet, après un Bac STD2A au lycée Haroun Tazieff à Saint-Paul-lès-Dax (40), et un BTS Design de Produit au lycée Le Corbusier à Illkirch-Graffenstaden (67).

    Pour mon projet de fin d’études à l’Ecole des Arts Décoratifs, j’ai réalisé une série de mobilier intitulée « Récits de Chantier », qui rassemble l’univers de la démolition, de l’archéologie et de la poésie. L’ensemble du mobilier est fabriqué à partir de matériaux issus de la démolition, récupérés sur des chantiers dans Paris. Ils ont pour vocation d'éduquer le regard, de partager les savoirs et de transmettre les récits, sur l’histoire des matériaux, des strates, des couches, des habits et des squelettes de nos habitations. Une façon d’étudier l’être humain, à travers l’ensemble des vestiges matériels, ayant subsisté au cours des siècles.

    Théo ETRILLARD © Béryl Libault
    Théo ETRILLARD © Béryl Libault

    Une journée sur le chantier de fouille du Haut-Empire de Lutèce à l’Ecole des Arts Décoratifs

    En 2025, l’École des Arts Décoratifs s'augmente, dans ses espaces et ses fonctionnalités pédagogiques, d'une extension architecturale écoresponsable .
    C’est pourquoi, l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) est intervenu en 2024 sur son site de la rue d'Ulm afin de mener des fouilles. L’emprise de la fouille se situe en limite de la ville du Haut-Empire de Lutèce, dans un contexte archéologique riche.

    J’ai eu l’immense chance de passer une journée avec les archéologues sur le site, de pratiquer les gestes, d’user des outils, d’observer les postures et les usages des travaux sur terrain. J’ai beaucoup aimé apprendre le vocabulaire du métier, les vestiges trouvés durant la fouille se désigne par le terme « Mobilier », et les murets de terre aménagés entre les différents espaces de fouille, par le terme « Banquettes ». Un champ lexical que le designer objet partage. De plus, les outils des archéologues sont principalement empruntés à d’autres pratiques, comme la pelle, la pioche et la brouette du jardinier, la truelle du maçon et le pinceau du peintre, la lunette de géomètre et le grattoir de dentiste. La main de l’archéologue est hybride, comme celle du designer, faite de divers métiers ancestraux.

    « Les vestiges trouvés durant la fouille se désigne par le terme « Mobilier », et les murets de terre aménagés entre les différents espaces de fouille, par le terme « Banquettes ». Un champ lexical que le designer objet partage. »

    Soutenance in situ

    Suite à des visites régulières, d’observations, de discussions, d’échanges, et cette journée de fouille, pour comprendre et apprendre ce que les archéologues œuvraient dans le chantier, j’ai eu l’opportunité de présenter mon diplôme sur le site archéologique.

    Ce fut l’occasion de mettre en parallèle mes recherches de projet, et l’ouvrage en cours au milieu de la cour. L’espace du site s’est doucement construit en un lieu idéal pour exprimer les grandes idées du projet, en plaçant le mobilier ici et là, ils donnaient à voir les strates et les couches du site. Celui-ci témoignant d’une activité d’extraction de matériaux pour la construction et recueillant des vestiges du Ier siècle av. J.C. pour les plus anciens, ainsi que les vestiges du Couvent des Ursulines, datant du XVIIe siècle.

    L’« After » : en bonne voie/x

    Mon « After » se présente dans la même philosophie que celle de mon diplôme, mes pieds me démangent de marcher, de parcourir les horizons ; Mes mains de faire, de fabriquer, de toucher la matière ; Ma tête de penser, d’écrire et d’imaginer des projets dans l’esprit et l’univers du diplôme.

    J’ai d’ailleurs la chance dans le cadre de la chaire du NID, Nouveaux Imaginaires du Dessin, d’accompagner les élèves de 1e année de l’Ecole des Arts Décoratifs, durant leur voyage d’études sur la thématique de la « Voix des Ruines » en cette rentrée 2024. Un voyage d'étude pour découvrir le patrimoine et les lieux désaffectés de la région Ile-de-France et du Centre-Val de Loire.

    De plus, toujours dans l’esprit de « faire chantier » à travers chaque projet, je candidate à des résidences artistiques afin de continuer mes recherches.
    À côté, je travaille en collaboration avec l’artiste et professeur Giuseppe Caccavale sur divers projets d’art mural et poétique des espaces, en France et en Italie. Mais l’essentiel pour moi est de retrouver le temps d’aller mettre les mains dans la terre, de cultiver et de partager les mots, d’accueillir des ruches et de soigner le monde.

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